Le lundi 23 décembre 2024
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Pour Jardiner en Ville ? BIO TOP ! Chez Toit où chez Moi … ?

29 août 2009

Dans ma famille, on ne cultivait pas de potager. Ni mon père, ni ma mère, ni mes sœurs ni mon frère, et surtout pas moi, lorsque j’étais haut comme trois pommes de terre, n’étions intéressés à jouer au jardinier. En fait, quand j’y pense, nous ne sentions même pas le besoin de cultiver un jardin, ni à la maison ni au chalet, pour une raison fort simple. Et vous savez laquelle ? Parce que nos tantes à Ste-Hélène de Kamouraska, tout près de Rivière-du-Loup, avaient tellement un grand cœur et un grand potager qu’elles se faisaient une joie d’offrir à toute la parenté leurs; carottes, patates, laitues, navets, fèves, betteraves et tomates, pour notre plus grand bonheur, et notre santé. C’était d’autant plus vrai qu’à l’époque, le jardin des tantes Gertrude, Blandine Marie-Paule et de l’oncle Robert était bio… Sans en porter le nom, puisqu’on ne sentait pas à l’époque le besoin d’insister là-dessus, on n’y utilisait en effet aucun fertilisant ni pesticide de synthèse, juste du gros bon sens, et beaucoup d’amour, de travail, et de bon fumier.

Toujours est-il que je n’ai jamais cultivé de légumes de ma vie… Des fleurs, oui! Comme bien du monde à la maison, on ne compte plus les vivaces et annuelles, les graminées, les arbustes, et gourmandise oblige, nos bien aimées et parfumées fines herbes (detail_chronique.php?ID=361741), mais des légumes? Non! Du moins, pas jusqu’à cette année. J’aurais d’ailleurs pu vous parler de ma nouvelle vocation potagère beaucoup plus tôt cet été lorsque j’ai décidé de m’y mettre, mais j’ai cru bon attendre le moment crucial qu’est la récolte du mois d’août, avant de vous faire part de mes observations. Dit autrement, ça ne me tentait pas de vous en parler à travers mon chapeau, de jardinier. Ça doit être dans ma nature, après tout, mon chum Bouddha disait « ne croyez pas ce que je vous dis, expérimentez-le »… Alors, j’ai expérimenté pour que vous n’ayez pas à me croire, sans preuve. Mais qu’est-ce que j’ai expérimenté au juste? Eh bien des bacs BioTop voyons. BioQuoi? BioTop! Retenez bien ce nom…

J’ai découvert l’objet en question, lors d’un 5 à 7 à Québec des Urbainculteurs (https://www.urbainculteurs.org/Accueil.html), un groupe dédié à la promotion de l’agriculture urbaine.  Ça ressemble à une simple boîte à fleurs, mais quand on sait lire entre les racines, c’est beaucoup plus qu’un simple bac. Le bac BioTop est le fruit, ou le légume si vous préférez, de 15 ans de recherche scientifique et surtout de tests. Un Québécois, Marc-André Valiquette, en collaboration avec Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) s’est  posé une question toute simple; quel serait le milieu de croissance idéal pour la meilleure production de végétaux qui soit? Et le résultat? « Tadam » , c’est le BioTop, un caisson de culture hors sol qui requiert peu d’entretien, et qui donne une production de 2 à 3 fois plus abondante que celle observée dans un potager conventionnel. De nombreuses fentes et beaucoup d’espace au fond du bac, dans le fond des cassettes de cultures, permettent un développement maximal des racines… D’autant plus que le « kit », en bon finlandais, comprend un super terreau bonifié de microscopiques champignons mycorhizes bénéfiques pour la plante, de l’engrais biologique à base d’algues marines, de la vermiculite pour faciliter la rétention d’eau et du paillis pour garder le système humide. En prime, le BioTop cache une réserve d’eau de près de 10 litres, ce qui veut dire que les fruits, légumes fleurs ou fines herbes ne subiront pas les affres de la soif. On peut même raccorder bout à bout tous les bacs Biotop, et créer ainsi un système d’irrigation automatisé et  autonome, ce qui est drôlement brillant si vous en posséder plusieurs. Alors, ça pousse? Ça pousse! Chaque bac devrait me donner une récolte moyenne de 7 livres de végétaux chaque saison. Moi je crois que ce sera bien au-delà, avec mes innombrables petites tomates noires Black cherry et mes grosses Goldmine toutes jaunes. Sans compter mes poivrons… À 65 $ chacun, avec tout ce qui vient avec et la garantie de 10 ans, moi j’estime que cet un bon investissement.

J’entends des lecteurs s’exclamer CHOU Thiboutôt! C’est même pas nouveau ces machins-truc là!?! Wowowo, d’abord le machin-truc a un nom, et puis, à ces empêcheurs de germer en rond, je rétorquerai… Qu’ils ont ma foi, raison! Après avoir remporté, haut le bac en 1996, la médaille d’or du Salon International des inventions de Genève dans la catégorie agriculture et en 1998 le prix du design industriel, on avait bel et bien mis en marché les bacs Biotop au Québec. Vous en avez donc peut-être déjà vu, sauf que… TIMING n’est pas une ville chinoise. Je veux dire par là que le bon moment, l’intérêt, le timing quoi, n’était pas encore venu. Et puis les Urbainculteurs n’étaient pas encore de ce monde pour s’assurer de bien promouvoir et surtout d’encadrer cette prometteuse invention québécoise. C’est correct, chaque chose en son temps. J’ai appris que ça ne sert à rien de tirer après une carotte dans un potager, elle ne poussera pas plus vite. Si on prend le temps qu’il faut on peut même y faire pousser un bananier…

Tant et si bien qu’en quelques mois à peine et sans aucune publicité, 2300 petits BioTop ont déjà trouvé preneurs, surtout a Québec, mais aussi a Montréal et à Sherbrooke (https://www.urbainculteurs.org/Points_de_vente.html) Et ce n’est qu’un début, car avec leur petite taille (28 x 8 x 10 po) et leur grande productivité, ces bacs sont faits sur mesure pour la ville et ses petits balcons, terrasses, toits plats, rambardes, et minuscules cours. Mais pourquoi donc s’obstiner à cultiver un potager en ville, me demanderont les incrédules? Eh bien parce que c’est là que vivent maintenant plus de 80 % des Québécois. La formule est de ce fait encore plus louable, que produire des aliments en ville, près des consommateurs ou mieux encore, chez les consommateurs, c’est contribuer à réduire le transport et de ce fait, les émissions de gaz à effet de serre. Pour qui s’intéresse au développement durable, et cherche des façons concrètes d’y prendre part, on appelle ça une délicieuse solution.

Et puis la formule Biotop est doublement gagnante en ville, car elle s’adapte parfaitement aux innombrables édifices à toits plats et dont la surface est carrément inutilisée. Prenez par exemple la Maison de Lauberivière à Québec, un centre d’accueil pour démunis et sans-abris. Peut-être avez-vous déjà entendu parler de leur toit-jardin? Vous devriez… On y compte actuellement 300 bacs… Oui vous avez bien lu. Et ce qui est encore mieux, c’est que d’ici 2011, grâce à un appui financier de 65,000 $ de la fondation GDG (https://www.fondationgdg.org) c’est 1000 bacs de culture qui y seront installés ce qui permettra de produire 4 tonnes d’aliments locaux, frais et bio, pour l’organisme qui sert annuellement plus de 140 000 repas. L’initiative ne fera pas que faciliter l’autonomie alimentaire du centre, mais permettra de favoriser la réinsertion sociale des usagers de la Maison qui devront apprendre à s’en occuper. En passant, sur un plan plus technique, nos toits au Québec sont conçus pour supporter jusqu’à 50 livres de neige et de glace par pied carré l’hiver venu. Alors avec une charge d’à peine 15 livres du pied carré les bacs BioTop ne posent aucun problème. Ils contribuent même tout comme les toits verts, à lutter contre l’étouffant phénomène des ilots de chaleurs urbains (detail_chronique.php?ID=361737).

D’autres projets tout aussi intéressants quoiqu’à plus petite échelle ont aussi vu le jour ces derniers mois. L’Hôtel du Vieux-Québec a réussi à enjoliver son toit, de verte façon grâce à l’ajout de 75 bacs, et projette déjà lui aussi d’agrandir. La micro-brasserie la Barberie n’est pas en reste avec ses bacs Biotop. On y fait pousser, quel hasard, de l’orge et du houblon… et ça pousse en grand, Hic! Je ne serais même pas surpris que dans un proche avenir on y fasse aussi pousser des petits fruits, pour parfumer les divines boissons que concoctent ces artisans de la bière artisanale.
 

 

Non, mais quelle belle trouvaille. Non seulement rafraichissante, mais aussi nourrissante.  Car, au moment ou nos aliments parcourent en moyenne 2500 kilomètres entre le champ et notre assiette, on a malheureusement perdu la trace de ce que l’on mange. Il y a de ça quelques décennies, une bonne partie de la population vivait en milieu rural et cultivait son potager. Sinon il y avait toujours un oncle qui vivait à la campagne et à qui l’on rendait visite histoire de se retremper dans l’atmosphère de la ferme. Mais de nos jours, si on demande à un enfant d’où viennent les patates frites qu’il mange, il vous dira probablement qu’elle vient des McDonald. Et la tomate de son sandwich elle vient d’où? Du Métro, du IGA ou du Provigo… Eh bien non! Ni patates ni tomates n’ont poussé là… Cultiver chez soi, c’est se réapproprier le droit de savoir d’où viennent nos aliments et le droit de choisir ce que l’on mange. Quand on sait que l’agriculture traditionnelle utilise d’énormes quantités d’engrais, d’herbicides, de fongicides, d’insecticide, et a recours à maintes techniques de conservation comme l’irradiation, sans parler des OGM... Vous avez le choix, pour manger des aliments sains, vous pouvez toujours acheter bio ou simplement jardiner!

Qui dit BioTop dit aussi biodiversité. Je sais, c’est un thème un peu théorique à première vue, mais vous allez vite comprendre, si ce n’est déjà fait, en quoi le jardinage avec les bacs Biotop, tout comme en potager traditionnel, y contribue sur plusieurs plans et plusieurs plants. Vous verrez, en attendant de goûter. Vous pourriez même en prendre de la graine, c'est-à-dire en tirer une belle leçon… Sur le toit de l’Auberivière, dans le Vieux-Port de Québec, en pleine basse ville, aussitôt que les premiers bacs ont été installés, d’autant plus qu’il y en a quand même 300, les coccinelles ont vite fait de refaire leur apparition, et les oiseaux aussi… Mes amis volatiles emplumés ont en effet vite compris que ce généreux garde-manger n’était pas que pour nous, les humains. Ils se sont alors bien vite pointés pour faire eux aussi bombance, des indésirables pucerons que la pluie avait fait se propager, notamment sur les plants d’aubergine. Il n’aura suffi, raconte-t-on, que de quelques jours pour que les petits envahisseurs disparaissent. Bel exemple d’interdépendance et de complémentarité où se manifeste la vie qui bat.

Et ça ne s’arrête pas là. Le fait de cultiver soi-même ses légumes en plein centre-ville est aussi en soi un terrain propice à la biodiversité appliquée. Moi qui aime bien découvrir de nouvelles saveurs, de nouvelles textures, et de nouveaux aromates, j’avoue que cela me plait bien de déjouer le dictat de l’industrie agroalimentaire. Je dis ça, parce qu’autant au supermarché que dans nos jardineries, on nous vend toujours sauf rares exceptions, les mêmes sempiternelles variétés de légumes, de fruits et de semences. Alors quand on décide de s’y mettre et de choisir ce que l’on mange, c’est la véritable corne d’abondance que de redécouvrir les milliers de variétés oubliées ou volontairement délaissées.  Le maître jardinier Yves Gagnon des jardins du Grand-Portage à St-Didace, ne mâche pas ses mots lorsqu’il rappelle que les variétés de carottes que l’on nous offre sur le marché ne sont pas choisies parce qu’elles sont les meilleures au goût, mais bien malheureusement parce qu’elles se conservent mieux et réagissent moins mal aux transports. Choisir ce que l’on mange c’est donc faire un pied de nez, ou un délicieux pied de céleri c’est selon, à ceux qui nous imposent ce qu’on doit supposément manger. Comme quoi le consommateur peut sortir des rangs, et choisir ce qui lui plait vraiment. L’été n’est même pas fini que je rêve à l’an prochain, alors que je projette de planter de cresson alénois, pour mettre du piquant dans mes salades, de même que des variétés fabuleuses comme la Green Sausage qui produit d’étranges tomates vertes longues et minces, sans oublier la ciboulette japonaise que m’a fait découvrir mon ami Rosaire. Bon j’y vais, j’ai un souper à préparer moi….

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François Thibouthot
Adresse: Journaliste chroniqueur
Québec
Canada
François Thibouthot
Journaliste chroniqueur

François Thiboutôt est journaliste et chroniqueur. Fort de 25 ans d'expérience à l'antenne de Radio-Canada, TQS, Télé-Québec et TVA, il consacre désormais son travail de communicateur engagé, à vulgariser les grands enjeux de la consommation responsable et du développement durable. François Thiboutôt agit aussi comme consultant auprès d'entreprises et d'institutions désireuses de prendre un véritable virage vert. Il est membre de l'AProDD (Association des Professionnels en Développement Durable) Au sein de l'Agence de conférenciers en environnement et développement durable « Terre à Terre » il présente aux quatre coins du Québec, sa conférence portant sur l'empreinte écologique intitulée « L'Urgence d'une Consommation Responsable ».