L'initiative de la Société d'habitation du Québec (SHQ) de réaliser des opérations de détection du radon dans l'ensemble de son parc d'habitations à loyer modique (HLM) ne passe pas inaperçue. Santé Canada salue l'action et des représentants de plusieurs autres provinces canadiennes s'intéressent au projet.
« Dans les rencontres du comité intersectoriel sur le radon, Santé Canada félicite régulièrement la SHQ pour son initiative unique à l'échelle du pays », affirme Sandra Vigneau, architecte à la SHQ et corédactrice du rapport de recherche Projet pilote de dépistage du radon dans des logements sociaux de la Gaspésie, réalisé en collaboration avec l'Institut national de santé publique du Québec.
Cette intervention de la SHQ avait aussi suscité beaucoup d'intérêt en avril 2016, lors du Congrès de l'Association canadienne des scientifiques et technologues sur le radon, qui s'était tenu à Montréal. À la suite de sa présentation du projet pilote de dépistage du radon, Mme Vigneau s'était entretenue avec des représentants du Nouveau-Brunswick, de l'Ontario et de l'Alberta. « Ils nous avaient dit que nous étions un exemple à suivre et que ce serait une bonne idée d'implanter ces mesures dans leurs provinces respectives. »
Pour le moment, à l'échelle canadienne, seul le Québec, à l'initiative de la SHQ, a entrepris de mesurer la concentration de radon dans l'ensemble de son parc de HLM. En 2014, un projet pilote a d'abord été amorcé en Gaspésie, une région où les taux de radon sont généralement plus élevés. Aux fins de l'enquête, 380 HLM ont été évalués. L'objectif était de déterminer si les taux de radon dans ces logements, établis en becquerels par mètre cube d'air (Bq/m3), excédaient les normes établies par Santé Canada.
La ligne directrice fédérale situe à 200 Bq/m3 de radon dans l'air le seuil maximal acceptable. Au-delà de ce dernier, des mesures d'atténuation doivent être entreprises pour préserver la santé des occupants d'un logement. « Plus le taux est élevé et plus la période d'exposition au radon est prolongée, plus les risques pour la santé sont importants », précise Mme Vigneau.
Le projet pilote a montré que les taux de radon excédaient la ligne directrice de Santé Canada dans 61 des 380 logements évalués. Ainsi, 54 logements présentaient des taux se situant entre 200 et 600 bq/m3, et 7, des taux excédant 600 Bq/m3.
« Lorsque la concentration mesurée se situe au-delà de 600 Bq/m3 de radon dans l'air, Santé Canada recommande de mettre en place des mesures d'atténuation dans un délai de 12 mois. Ce délai est de deux ans dans le cas de concentration se situant entre 200 et 600 Bq/m3 », ajoute Mme Vigneau.
Des mesures d'atténuation du radon ont déjà été appliquées dans ces logements.
Un gaz radioactif et cancérogène
Le radon est un gaz radioactif provenant de l'uranium naturellement présent dans la croûte terrestre. On trouve du radon dans le sol partout à la surface de la Terre. Toutefois, sa concentration peut varier beaucoup d'un endroit à l'autre.
Le radon peut s'infiltrer dans les habitations par les fondations. En trop grande concentration, ce gaz peut entraîner des risques importants pour la santé. « Comme il est inodore, incolore et insipide, il est impossible à détecter par les sens. C'est pourquoi il est important de mesurer sa concentration », explique Mme Vigneau.
Selon les agences de santé internationales, le radon est la deuxième cause du cancer du poumon après le tabagisme lorsque l'exposition est prolongée.
Au Québec¹, on estime que le radon est associé à 16 % des décès par cancer du poumon. Cela représente plus de 600 pertes de vie par année. Les fumeurs qui sont exposés à des concentrations élevées de radon sont plus susceptibles de développer un cancer du poumon. En effet, 60 % des décès par cancer pulmonaire associés au radon surviennent chez les usagers du tabac, contre 30 % chez les non-fumeurs, chez qui il est néanmoins la première cause de ce type de cancer.
Des mesures de détection dans tout le parc de HLM
Consciente des risques pour la santé que présente une exposition au radon et à la suite des résultats du projet pilote, la SHQ a demandé, en octobre 2016, à tous les centres de services, de toutes les régions du Québec, de procéder à des mesures du taux de radon dans les immeubles d'habitation à loyer modique situés sur leur territoire. L'exercice devrait être complété avant décembre 2018.
Seuls les logements situés au niveau le plus bas des immeubles sont visés, car le radon s'accumule plus facilement dans les pièces situées près du sol. La concentration de radon dans l'air intérieur dépend de nombreux facteurs : la concentration d'uranium et de radon dans le sol, le climat, la ventilation des lieux, l'étanchéité ou l'isolation de la maison.
Quelque 28 000 mesures de détection sont prévues dans l'ensemble du parc de HLM du Québec, continue Mme Vigneau. « Comme le taux de radon peut varier beaucoup, la directive est de prendre des mesures à l'aide d'un dosimètre durant un minimum de trois mois, en hiver, au moment où les logements sont moins bien ventilés. »
Des mesures d'atténuation seront par la suite mises en œuvre dans le cas des logements où les mesures révéleront des taux de radon dans l'air supérieurs à 200 Bq/m3.
Les principales mesures d'atténuation consistent à :
- colmater les fissures de la fondation;
- sceller les ouvertures en contact avec le sol;
- s'assurer que les puisards sont couverts et ventilés vers l'extérieur;
- améliorer la ventilation du logement.
Dans la majorité des cas les plus sévères, on procédera à l'installation d'un système de dépressurisation active du sol afin que le radon ne pénètre plus dans les logements.
« Le radon est une problématique sanitaire relativement nouvelle. Il y a 20 ans, on n'en parlait pas. Les choses ont changé et aujourd'hui, la prise de mesures du taux de radon dans les logements permettra de prévenir d'importants problèmes de santé », conclut Mme Vigneau.
¹ Source : www.sante.gouv.qc.ca/conseils-et-prevention/radon-domiciliaire/
Crédit photo: Société d'habitation du Québec