Le lundi 23 décembre 2024
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Sécurité routière : attention aux autobus scolaires !

14 décembre 2018

On le sait, il est interdit de dépasser ou de croiser un autobus scolaire dont les feux rouges intermittents sont en marche ou lorsque le signal d'arrêt obligatoire est déployé. Un récent projet pilote visant à munir certains autobus scolaires de caméras pour documenter le nombre de dépassements et de croisements illégaux d'autobus scolaires a cependant mis en lumière que certaines personnes comprenaient mal cette infraction, alors que d'autres prenaient des risques inutiles ou choisissaient carrément d'en faire fi.

Voici quelques exemples de jugements permettant de mieux en comprendre la portée.

D'abord, le droit

Selon les termes de l'article 460 du Code de la sécurité routière :

  • le conducteur d'un véhicule routier ou un cycliste
  • qui approche d'un autobus ou minibus affecté au transport d'écoliers
  • dont les feux rouges intermittents sont en marche ou lorsqu'il est fait usage de son signal d'arrêt obligatoire
  • doit immobiliser son véhicule à plus de 5 mètres de l'autobus ou du minibus
  • et ne peut le croiser ou le dépasser que
    • lorsque les feux rouges intermittents sont éteints et le signal d'arrêt obligatoire escamoté
    • et qu'après s'être assuré qu'il peut le faire sans danger.
  • sauf si l'autobus ou le minibus est sur une chaussée adjacente séparée par un terre-plein ou un autre dispositif physique surélevé (cette exception ne s'applique pas lorsqu'on est devant l'ouverture du terre-plein)

En cas d'infraction, un automobiliste s'expose à une amende de 200 $ à 300 $, assortie de 9 points d'inaptitude, alors qu'un cycliste peut se voir imposer une amende de 80 $ à 100 $.

Ainsi, comme le résume la Société de l'assurance automobile du Québec, quand un autobus scolaire a activé ses feux intermittents ou son panneau d'arrêt, il faut s'immobiliser à plus de 5 mètres, et ce, que l'on roule dans la même direction que l'autobus ou dans le sens inverse.

Cela semble simple ? Voici quelques situations particulières sur lesquelles se sont penchés les tribunaux.

L'autobus scolaire est immobilisé à une intersection

  • L'interdiction de croiser ou de dépasser l'autobus scolaire s'applique à tous les véhicules qui s'en approchent, peu importe qu'ils viennent de l'arrière, de l'avant, du côté ou en diagonale, sauf lorsqu'un terre-plein sépare l'autobus et le véhicule.
  • La zone de sécurité de 5 mètres doit non seulement entourer l'autobus, mais elle doit aussi se mesurer à partir d'une ligne qui traverserait la rue d'un côté à l'autre de façon perpendiculaire et tracée à partir du devant ou de l'arrière de l'autobus (Sauvé).

Le conducteur ou le cycliste se trouvent à moins de 5 mètres de l'autobus lorsque les feux rouges intermittents s'allument ou que le signal d'arrêt est déployé

  • L'obligation de s'immobiliser ne disparaît pas par le fait que l'on est à l'intérieur de la zone de 5 mètres (Fleury-Fortin).
  • Le conducteur doit immobiliser son véhicule là où il se trouve et il ne peut croiser ni dépasser l'autobus avant que les feux intermittents ne soient éteints et que le panneau d'arrêt obligatoire ne soit escamoté (Desnoyers).
  • Il doit s'immobiliser de manière à ne pas bloquer le passage des écoliers (Sauvé).

Le chauffeur de l'autobus actionne les feux clignotants jaunes pour signaler son intention de s'arrêter et de faire monter ou descendre des écoliers

  • Comme lorsque le feu de circulation devient jaune, le conducteur doit immobiliser son véhicule avant de croiser ou de dépasser un autobus scolaire dont les feux jaunes sont actionnés, à moins que le croisement ou le dépassement ne soit commencé au moment où ils sont actionnés ou à moins qu'il n'en soit si près qu'il lui serait impossible d'immobiliser son véhicule sans danger (Croisetière et Beaulieu)
  • L'utilisation des feux intermittents jaunes a pour but de ralentir la circulation devant et derrière les autobus scolaires afin d'éviter les manœuvres brusques de freinage ou d'accélération.

Le chauffeur de l'autobus ne respecte pas ses propres obligations

La responsabilité pénale du conducteur ou du cycliste est enclenchée dans tous les cas où les feux intermittents sont en marche ou lorsque le signal d'arrêt obligatoire est actionné, même en l'absence de passagers montant dans l'autobus ou en descendant ou encore présents dans l'autobus, que ce soit des écoliers ou d'autres personnes. (Chaput)

L'autobus est dans le stationnement d'une école

Bien que ce soit inconcevable, l'infraction ne s'applique pas sur les terrains ou stationnements appartenant à une commission scolaire (Osterstock).

En cas de doute ? Il faut se rappeler que l'obligation de s'immobiliser a pour objectif de protéger les écoliers qui traversent la rue soit pour y monter, soit pour en sortir. Faites comme les tribunaux et optez pour l'interprétation qui favorise le plus la sécurité des écoliers !

Références

  • Putorti c. Ville de Laval (C.S., 2004-06-10), SOQUIJ AZ-50259198.
  • Montréal (Ville de) Sauvé (C.M., 2014-01-28), 2014 QCCM 18, SOQUIJ AZ-51041212, 2014EXP-968, J.E. 2014-521.
  • Laval (Ville de) c. Fleury-Fortin (C.M., 2010-03-11), 2010 QCCM 58, SOQUIJ AZ-50615867.
  • Laval (Ville de) Desnoyers (C.M., 2006-12-06), 2006 QCCM 353, SOQUIJ AZ-50400162.
  • Joliette (Ville de) Croisetière (C.M., 2007-04-17), 2007 QCCM 160, SOQUIJ AZ-50427998.
  • Directeur des poursuites criminelles et pénales Beaulieu (C.M., 2018-05-23), 2018 QCCM 155, SOQUIJ AZ-51519139.
  • Chaput Montréal (Ville de), (C.S., 2012-05-15), 2012 QCCS 2506, SOQUIJ AZ-50861911, 2012EXP-2593, J.E. 2012-1362.
  • Lévis (Ville de) Osterstock (C.M., 2009-06-18), 2009 QCCM 194, SOQUIJ AZ-50561509, J.E. 2009-1456.

Pour plus d'information

Catherine Vaillancourt-Gauvreau

Catherine Vaillancourt-Gauvreau
Avocate

Catherine Vaillancourt-Gauvreau est conseillère juridique à SOQUIJ depuis avril 2018. Avocate depuis 1995, elle a exercé en pratique privée, a été conseillère juridique au sein de la fonction publique québécoise, notamment au Secrétariat à l'adoption internationale, et a été rédactrice juridique pigiste pour La référence (Éditions Yvon Blais) pendant plusieurs années. Elle écrit pour L'Express en matière de droit criminel et pénal.