Dans l’affaire Paule Blain-Clotteau c. Ville Brownsburg-Chatham, la Cour supérieure du Québec a eu à se prononcer sur la question du remboursement des frais judiciaire d’un élu municipal poursuivi dans le cadre d’un recours intenté par le maire de la ville. Le jugement en question est disponible sur le site internet www.jugement.qc.ca et cité sous la référence 2011 QCCS 6208.
Dans le cadre d’un désaccord portant sur la mission de la Société de développement économique Brownsburg-Chatham, les deux élus municipaux ont eu des positions divergentes qui ont mené vers le remplacement de la conseillère municipale Madame Paule Blain-Clotteau à titre de représentante de la ville au sein du conseil d’administration de la société de développement.
Le maire n’ayant pas apprécié certains propos tenus par la conseillère lors d’une entrevue télévisée à un canal communautaire, ce dernier intente donc une requête en diffamation en son nom personnel contre la conseillère municipale. Dès lors, la conseillère municipale mandate son propre avocat pour la défendre, lequel requiert de la ville l’assurance que le paiement des honoraires juridiques de la conseillère municipale seront acquittés par la ville.
Suite à l’obtention d’un avis juridique gardé secret, la ville n’adopte aucune résolution pour refuser ou accepter la demande du procureur de la conseillère municipale. D’autre part, la conseillère municipale n’a pas pu prendre connaissance de l’opinion juridique formulée par le procureur de la ville.
Dans le jugement, le juge examine les faits et vient à la conclusion que lorsque la conseillère municipale a donné une entrevue à la journaliste de la télévision communautaire, elle agissait en tant que conseillère municipale qui exprimait son point de vue sur la façon dont le maire se comportait face aux membres du conseil et en regard de la société de développement. Se faisant, la conseillère municipale agissait, selon le tribunal, dans l’exercice de ses fonctions et elle a le droit que la ville lui rembourse les frais judiciaires encourus pour se défendre dans le cadre du recours en diffamation intenté par le maire.
Le tribunal juge peu sérieux les motifs pour lesquels le refus d’assumer le coût des honoraires juridiques nécessaires à la défense de la conseillère municipale et le tribunal rappelle que la loi est claire et que les agissements de la conseillère municipale ne peuvent être assimilés à une faute lourde, intentionnelle ou séparable de l’exercice des fonctions de la personne.
Procédant à une revue de la jurisprudence, le juge soutient que la ville n’a pas de discrétion dès que les conditions d’application prévues à l’article 604.6 de la Loi sur les cités et villes sont réunies. Cette protection est donc immédiate et automatique, à moins qu’il n’y ait renonciation par le bénéficiaire.
Le tribunal s’interroge d’ailleurs à l’égard du fait que la ville assume les frais judiciaire du procureur représentant le maire dans le cadre du recours en diffamation intenté par ce dernier alors que sa position devant le tribunal fait en sorte qu’elle refuse le même traitement à la conseillère municipale. D’ailleurs à cet effet, le conseil municipal a refusé de débattre cette problématique et la ville a refusé de remettre à la demanderesse le support sur lequel l’enregistrement vidéo de l’entrevue était reproduit.
Considérant ces éléments, la Cour supérieure accueille donc la requête de la conseillère municipale visant à ce que la ville de Brownsburg-Chatham assume ses frais de défense dans le cadre de la poursuite en diffamation.
Nous sommes d’avis que cette décision vient confirmer à nouveau le principe à l’effet qu’un élu municipal a droit au remboursement de ses honoraires juridiques lorsqu’il subit une poursuite qui découle de l’exercice de ses fonctions.
Il ne s’agit plus d’une décision discrétionnaire de la municipalité, mais bien d’une obligation en ce sens. Dans le cours normal de l’administration de ses affaires, il est raisonnable qu’une municipalité assume le coût des honoraires juridiques encourus par un membre du conseil qui doit se défendre dans le cadre d’une action intentée devant un tribunal.